Il est relativement facile et intéressant de concevoir des règlements, mais il est plus difficile et moins plaisant de définir les mesures concrètes de supervision qui en assurent l’application. Par conséquent, la supervision ne reçoit pas une grande attention au cours du processus de réforme de la réglementation. On part souvent du principe que, quelles que soient les questions de supervision soulevées par les nouvelles réglementations, elles pourront toujours être traitées plus tard. Cette supposition s’avère souvent erronée et peut conduire à une situation où la réglementation n’est pas appliquée, ce qui est encore pire que l’absence de réglementation (Kalala F., 2010).
Une bonne application de la supervision devrait prévenir les problèmes. Il est donc essentiel de prêter attention de façon précoce et réaliste aux aspects de la supervision prudentielle en raison de la responsabilité fiduciaire assumée par l’Etat lorsqu’il accorde des agréments à des institutions financières.
Dans L’UEMOA , la Supervision des systèmes financiers décentralisés incombe aux autorités monétaires des Etats membres (Ministères des Finance) avec la collaboration de la Commission bancaire de L’UEMOA et la BCEAO. En revanche, dans la CEMAC , la supervision des Etablissements de Microfinance incombe à la COBAC, avec la collaboration des Ministères des Finances des pays membres (A. Goujon, 2009).
Ces institutions de tutelle ont la charge de contrôler le respect par les institutions de microfinance des dispositions législatives et réglementaires qui leurs sont applicables.
En Afrique de l’Ouest comme en Afrique Centrale, le secteur de la microfinance a connu une croissance exponentielle depuis les années 90. L’UEMOA ne compte pas moins de 700 institutions en activité en 2009, soit 4000 points des services. Dans la CEMAC, pas moins de 880 des institutions sont en activité, avec une forte rotation : il se crée presque une institution chaque jour (A. Goujon, 2009).
Or, la forte croissance du secteur, la limitation des moyens de communication ou le manque de formation des acteurs de la microfinance sont autant d’obstacles pour les administrations aux ressources humaines, budgétaires, et technologiques limitées.
L’organisation du travail des autorités de tutelle dans ces deux régions met en valeur une série de solutions développées par ces administrations pour répondre aux défis de la supervision, lesquels sont au cœur de cette recherche menée à Kinshasa, en République démocratique du Congo au sein de la Banque Centrale.
2. Problématique
La République démocratique du Congo (RDC), comme certains pays du monde, connait depuis quelques années une augmentation du nombre d’institutions de microfinance. Et certaines de ces institutions devraient appliquer la réglementation dans la gestion quotidienne de leurs activités, mais éprouvent des difficultés dues entre autres à une quasi inadaptation de cette réglementation aux réalités de terrain et à un déficit de vulgarisation. Nous référant à nos récentes investigations sur la gouvernance des institutions de microfinance au sein des 11 IMF actives à Kinshasa, les constats suivants ont été faits :
très peu d’entre elles connaissent les principes réglementaires qui régissent leur secteur ; parmi celles qui connaissent la règlementation, très peu encore respectent les principes règlementaires, le contrôle que la Banque Centrale exerce sur elles s’avère peu suffisant.
Face aux problèmes ci-haut soulevés, nous nous posons deux questions essentielles suivantes : - Quels sont les facteurs explicatifs de l’inefficacité de la supervision du secteur de la microfinance en RDC ? - Quel est le modèle de supervision susceptible de sous-tendre l’efficacité dans le développement sectoriel de microfinance en RDC ?
ANALYSE THEORIQUE ET EMPIRIQUE SUR LES MODELES DE SUPERVISION EN MICROFINANCE
En tant qu’intermédiaires financiers, les IMF intéressent directement les autorités monétaires en charge de la stabilité de la monnaie et de la sécurité de l’épargne du public, en particulier lorsqu’il s’agit de l’épargne populaire. Or le nombre élevé d’intervenants rend parfois cette supervision difficile. La faible capacité technique de la plupart des IMF rend aussi les méthodes habituelles de supervision bancaire inadaptées. Le droit de la supervision des IMF prend donc en compte cette double contrainte.
Il essaie parfois de retranscrire la distinction établie au niveau de la doctrine entre la réglementation prudentielle, la réglementation non prudentielle et le traitement spécifique des très petits intervenants à base communautaire (tontines, micro mutuelles). Dans cette optique, on voit parfois apparaître une modulation de l’action du superviseur entre son cœur de métier (la supervision prudentielle), la supervision axée sur la transparence financière et le suivi non prudentiel des microstructures.
Cette distinction, qui suppose des choix sur l’optimisation des tâches du superviseur, reste toutefois encore très minoritaire au profit d’une logique plus classique selon laquelle toute structure formelle qui exerce une activité de microfinance doit être agréée, donc supervisée de manière prudentielle.
D’une manière générale, la réflexion sur les coûts de la supervision reste encore embryonnaire dans les pays francophones, même si certains actes administratifs (agrément notamment) sont parfois payants. Il arrive aussi qu’une partie du secteur financier soit assujettie à une taxe sur la supervision, ce qui témoigne d’une prise en compte de la nécessité de financer le superviseur .
ETAT DES LIEUX DE LA SUPERVISION DU SECTEUR DE MICROFINANCE EN RDC
Le secteur de microfinance est régi par plusieurs textes réglementaires. Les différents textes légaux et réglementaire qui régissent les activités de la micro finance sont les suivantes : Loi n°002/2002 du 02 février 2002 portant disposition applicable aux coopératives d’épargne de crédit.
Cette loi définit un cadre institutionnel spécifique aux coopératives d’épargne et de crédit destiné à sauvegarder les particularités inhérente à leurs modalités d’organisation et de fonctionnement. Les coopératives constituent ainsi des entreprises ou des groupements de personne dotées de la personnalité juridique et fondés sur les principes d’union, de solidarité et d’entraide mutuelle et ayant pour vocation de porter assistance à ses membre en leur assurant un accès suffisant aux services financiers.
Loi n°003/2002 de 02 février 2002 relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit. Cette loi, appelée également loi bancaire, couvre toutes les entreprises du secteur financier et le définit à partir de leur fonction économique qui est la réalisation d’opérations bancaires. Elle définit l’ensemble des activités du secteur financier.
Ces opérations sont de trois catégories, à savoir : - La réception de fonds du public ; - Les opérations de crédit et ; - Les opérations de paiement et la gestion des moyens de paiement.
Loi n° 005/2002 du 02 février 2002 relative à la constitution, à l’organisation et au fonctionnement de la Banque Centrale du Congo.
La loi susmentionnée détermine les organes de la Banque Centrale ainsi que leurs pouvoirs respectifs. Elle précise les missions de cette institution de droit public et consacre son indépendance dans la réalisation de celles-ci.
Dans ce contexte, le législateur reconnait à l’institut d’émission le pouvoir d’élaborer la réglementation et de contrôler les établissements de crédit, les institutions de micro finance et les autres intermédiaires financières. Il importe de préciser qu’à travers cette loi, les missions de la Banque Centrale ont été recentrées en insistant sur les principes bancaires susceptibles de favoriser l’insertion du pays dans les communautés économiques régionales et internationales.
La loi n°11/020 du 15 septembre 2011 fixant les règles relatives à l’activité de la Microfinance en République démocratique du Congo
La présente loi a pour objet de régir l’activité de Microfinance en République Démocratique du Congo. Par ailleurs, un projet de loi devant régir les activités de micro finance poursuit son parcours d’adoption au parlement, avant sa promulgation par le président de la république. Il a été conçu suivant un processus participatif et selon les meilleures pratiques du secteur.