Etude et Perspective sur les Retombées Socio-économiques de la Libéralisation du Marché des Assurances en République Démocratique du Congo
Le processus de libéralisation comme une réalité irréversible, quelle sera l’avenir de la SONAS, la seule compagnie d’assurance ayant jouie d’un monopole exclusif pendant quatre décennies et comment se prépare t-elle face à la concurrence qui ponte à l’horizon.
Le secteur des assurances en République Démocratique du Congo n’a pas fait partie du code des investissements pour la simple raison que l’exploitation des assurances était entièrement livrée à la société de l’Etat dénommée SONAS, à qui l’Etat à donné le monopole du marché, pour des raisons que nous développerons dans la suite de notre travail.
Il est important de faire savoir que les assurances dans notre pays la R.D.C., se sont institutionnalisées à partir de l’acte de BERLIN en 1885, qui était suivi par la décision d’industrialiser les assurances. L’autorité coloniale voulait pour preuve ce message publicitaire : « Charles Le Jeune (assurances) SPRL assurent des risques dans le bassin du Congo depuis 1889 » . Mais c’est effectivement au cours de l’année 1931 que la compagnie Charles le Jeune deviendra une SARL de droit coloniale, alors que bien avant, elle avait un statut de droit belge.
A titre informationnel pour les uns et pour rappel aux autres, pendant l’époque coloniale, il y a eu plus d’une douzaine de compagnies d’assurances qui ont opéré dans notre pays ; nous pouvons citer : la compagnie Charles LE JEUNE à Kinshasa, IMMO-CONGO,CETAS,BOELS et BECAULT,AMI dont certaines œuvraient comme courtiers et d’autres comme agents de plusieurs compagnies parmi les quelles : LA CONCORDE,MELOT LOUIS JOS, union marine and général insurance, national union of Pittsburg, A.G.A Congo…
Pour les deux Kivu : CASTODO à Bukavu et du châtelet à Goma, pour le KATANGA : Marco habile, United agences, alphabet, compagnie foncière du Katanga et général trust d’Afrique(GUTAF) qui était un courtier de SOUTH BRITISH, pour la province de l’équateur : la compagnie S.A.B WANGATA, pour la province orientale (haut Congo) : haletai et URANUS
Laisser libre cours à l’initiative privée dans tous les domaines économiques de la vie d’une nation, a toujours été l’une des voies-clé de l’épanouissement de celle-ci. Pour une économie modérée et rapidement relancée, l’Etat doit jouer son rôle de régulateur de l’économie nationale, il doit ipso facto faire preuve de sécurisation des personnes et de leurs patrimoines, donnant valablement un souffle nouveau à un secteur aussi promoteur que rentable, à ’occurrence ; « les assurances » car, comme ont pu le constater Willy PALM et Henri LEWALLE, « Faire les assurances autrement, revient à les faire accessibles à tous, les démonopoliser au profit des intérêts généraux, les redonner une image sociale et économique sous la supervision du pouvoir public, et enfin, c’est les mettre au service des relations industrielles à l’échelle mondiale pour engendrer une concurrence dans leur secteur », c’est une rationalisation au bénéfice de la nation et son développement à long terme.
Bien que généralement les assurances aient une législation particulière au travers le monde, en République Démocratique du Congo, elles nécessitent une libéralisation tout à fait objective en vue d’apporter un surplus dans la société. Certes, ce processus n’est pas facile à réaliser, il n’est pas non plus impossible mais, il est envisageable, plus que nécessaire et capital au traitement des questions relatives à la relance économique de notre pays. Il est aussi capital pour le progrès social et pour adhérer au concept du principe non discriminatoire. C’est à ce titre que l’Etat congolais fera des efforts considérables pour rendre possible une réglementation et accélérer progressivement les procédures en matière de cette ouverture.
Si le droit des affaires en République Démocratique du Congo régit les sociétés commerciales, s’intéresse à la législation en matière d’investissement et du travail, régit également l’activité bancaire, minière et d’hydrocarbure ainsi que le domaine industriel ; bref, si le droit des affaires régit essentiellement des grosses affaires et activités lucratives opérées et réalisées par des personnes morales, pourquoi pas nous poser une question assez importante de savoir, pourquoi le législateur congolais s’est seulement limité à aborder l’analyse du contrat d’assurance sans pour autant insérer le secteur d’assurance dans le code des investissement applicable au Congo ?
Le développement de tout pays est tributaire du dynamisme de ses secteurs productifs et de leur capacité de satisfaire la demande de la consommation à tout niveau possible. La préoccupation déjà soulevée au cours de cette problématique a été pour nous majeure et nous pousse a en ajouter une seconde :
Le processus de libéralisation comme une réalité irréversible, quelle sera l’avenir de la SONAS, la seule compagnie d’assurance ayant jouie d’un monopole exclusif pendant quatre décennies et comment se prépare t-elle face à la concurrence qui ponte à l’horizon ?
Toutes les stratégies sont bonnes pour l’Etat, quand il s’agit de renflouer la caisse du trésor public, en vu des dépenses publiques et autres charges de l’Etat. Cependant conscient de la fuite de capitaux enregistré dans le secteur d’assurance pendant la période coloniale, l’Etat doit être plus vigilent et prudent en ce qui concerne son économie nationale, à ce niveau, il verra le résultat beaucoup plus positif en libéralisant le marché. L’Etat doit trouver impérieux de promouvoir une culture d’assurance en République Démocratique du Congo, qui induit les acteurs en assurance à un effort communicationnel avec les populations, dans le but de les sensibiliser à devenir consommateurs pour leur gain propre et œuvrer pour le bien être de l’intérêt général.
Eveiller l’attention du législateur et de l’exécutif congolais à changer leur vision face au secteur des assurances en vue de le rendre profitable à tous, est le bien fondé principal justifiant notre choix du sujet. Le développement économique d’une nation est une affaire de tout le monde. Cependant, tout le monde n’est pas tenu de jouer un rôle partout, mais il existe un régulateur du secteur économique qui est le pouvoir exécutif et un organe des réglementations et législation ayant la prérogative exclusive de réguler, réglementer et légiférer en matière de bien nombre des domaines existant dans un pays. Par ailleurs, nous constatons amèrement que ces deux pouvoirs à l’occurrence ; exécutif et législatif congolais, ont négligé considérablement le secteur des assurances, à tel enseigne que l’on pourrait affirmer qu’ils en ont fait cadets de leurs soucis. Ce qui est inadmissible pour un pays en quête de reconstruction et surtout aspirant au développement socio économique intégral et durable.
Section 1. Historique des assurances en R.D.C
Cet aperçu historique va être retracé à travers deux grandes époques : L’époque d’avant 1966 et celle courant à partir de l’année 1966 jusqu’aujourd’hui. Nous tenons à faire remarquer ici que, ces deux époques dont il est question, même en date d’aujourd’hui, constituent la période d’avant la libéralisation.
Comme dans beaucoup d’autres pays d’Afrique, la République Démocratique du Congo a connu et pratiqué les assurances sous une forme purement traditionnelle, sans pour autant se rendre compte que c’étaient des telles pratiques qui devraient se transformer en assurance avec l’arrivée des colonisateurs.
En effet, l’Afrique en général et le Congo en particulier pouvaient compter sur la « solidarité » qui permettait à l’individu de faire face à certaines vicissitudes de la vie. Cette pratique connue sous le nom de «Solidarité familiale ou clanique» se voyait porter assistance à l’individu membre du clan ou de la famille en cas des difficultés.
Notons que la colonisation en République Démocratique du Congo est arrivée alors que la pratique de l’assurance avait déjà atteint son apogée dans les vieux continents en s’imposant comme service incontournable pour toute activité de la vie, plus spécialement dans le secteur des transactions commerciales par voies maritimes.
Au fur et à mesure que le pouvoir colonial s’implantait en s’imposant partout, pour tout et en tout, l’autorité coloniale a pu rendre l’adhésion à certaines assurances obligatoire ; c’est le cas de la sécurité sociale des travailleurs, ainsi que les assurances incendie des biens octroyés en crédit aux indigènes (autochtones), tel que les maisons de l’office des logements (l’O.L) et les fonds d’avances.
Signalons que la combinaison du système de crédit et celui des assurances a permit la R.D.C à connaître un essor économique appréciable, nonobstant une forte extraversion de ses activités.
Cette extraversion s’est vivement manifestée dans le secteur des assurances au point d’en devenir un caractère principal à cette époque coloniale. Elle s’observait à partir des compagnies d’assurances qui opéraient au pays et dont la plupart n’était que des bureaux de représentations de leurs maisons mères installées dans la métropole et régies par les lois étrangères.
§2. Caractéristiques spécifiques du marché des assurances avant 1966
Nous l’avons dit tantôt, pendant que colonisateurs s’assuraient en vie et en dommage, les congolais (autochtones) eux de leur côté, pratiquaient la solidarité familiale, ce qui semblait suffisant pour couvrir des petites difficultés sociales. Cette pratique était tout à fait normale dans le chef des congolais d’autant plus qu’ils étaient vraiment loin d’être intégré dans la vie économique et dans le monde des affaires commerciales.
En effet, à l’époque coloniale, le marché d’assurances en République Démocratique du Congo a été principalement exercé dans ses caractéristiques remarquables et très spéciales, qui peuvent être résumées et classées au nombre de trois, à savoir :
§3 : Les assurances en République Démocratique du Congo avant 1966
Jusqu’à 1966, les assurances étaient gérées et contrôlées par les bureaux d’exploitation des compagnies d’assurances étrangères. Ces bureaux ne disposaient d’aucune autonomie de décision et n’avaient pour mission que de présenter les produits d’assurance et d’encaisser des primes pour le compte des maisons mères.3
En dépit de l’existence de toute cette multitude des compagnies d’assurances installées au Congo, dans les milieux traditionnels congolais, l’individu continuait à compter sur l’assistance familiale pour faire face aux problèmes et aléas de la vie, il ne sentait aucunement pas la nécessité de souscrire à une quelconque police d’assurances, l’individu n’avait pas à se tracasser outre mesure des aléas de la vie, car lorsqu’un événement aléatoire d’ordre social ou financier survenait, les membres de sa famille ou de son clan, lui venaient en aide immédiatement pour faire face aux difficultés et pertes financières engendrés par le dit événement. C’en était de même, lorsqu’il causait un dommage à autrui, la famille intervenait pour exiger la réparation ou pour contribuer à cette réparation.
Notons par ailleurs que de 1960 à 1966, la décision d’accepter le risque en assurance et celle de solliciter la réassurance (cession) en cas de besoin, ne revenait toujours qu’aux maisons mères des filiales congolaises, qui étaient installées à l’étranger. Dans ces conditions d’extraversion en outrance, il est évident que la fonction économique et sociale des assurances ne soit accomplie, que le secteur d’assurance ne puisse répondre à sa mission social et que l’action des assurances ne puisse produire des effets bénéfiques pour la République, déjà indépendant. Ce jeune Etat (République Démocratique Du Congo) avait forcement besoin des financements pour diverses nécessités prioritaires, d’où, une difficulté éprouvée pour son décollage économique. C’est effectivement dans un premier temps, pour raison de freiner la fuite des capitaux, que les pouvoirs publics prendront la décision de ravir l’exploitation des assurances entre les sociétés étrangères.
§4 : Rôle économique effectif avant la création de la SONAS
D’aucun se pose éventuellement la question de savoir, quel a été effectivement le rôle qu’à joué l’industrie des assurances dans notre pays, avant l’arrivée de la Société nationale d’assurances (SONAS). Pour le compte de la République Démocratique du Congo, certainement, le marché d’assurance n’a vraiment pas joué un rôle bénéfique dans les aspects du développement avant la création de la SONAS.
Ayant qualité d’investisseurs institutionnels, les compagnies d’assurances doivent contribuer à la promotion du bien-être non seulement de leurs assurés, mais aussi de celui de toute la population, par le biais de leur politique et technique économico-financière. Cependant, nous constatons qu’en matière d’investissement, les compagnies d’assurances étrangères qui ont existé au Congo avant l’avènement de la SONAS n’ont rien laissé. Elles n’ont accompli qu’un rôle social, encore au profit des étrangers, relatif à la protection de leurs activités exercées à leur faveur au Congo. C’est encore et toujours le caractère extraverti et discriminatoire de ces compagnies qui est à la base de cette carence.
De ce fait, le placement des réserves techniques dépendait des centres de décisions éloignés du pays, inaccessible à l’influence nationale. Alors que, les provisions techniques sont nécessaires pour fournir des crédits et des capitaux et les pouvoirs publics étaient dans l’impossibilité de décider sur cette matière faute de réglementation en la matière.
Section 2 : La Création de la SONAS
Créée le 23 novembre 1966, par l’ordonnance loi n°66/622, complétée par celle n°66/622 bis de la même date, la SONAS va commencer ses activités avec un déséquilibre entre les ressources financières disponibles et les obligations lui léguées en matière des sinistres, car les pouvoirs publics, ayant interdit l’exploitation des sociétés d’assurances aux étrangers ; n’avaient pas fait malheureusement attention à la rétrocession des primes afférentes aux sinistres encours d’exercice, qui étaient néanmoins à la charge de ces compagnies déchues ; d’où, leurs sinistres ont été hérités par la SONAS alors qu’elle n’en avait rien perçu comme primes des couverture des risques et n’en avait constitué aucune provision technique ni en faire objet de placement. Bref ; aucun transferts financier n’était réalisé.
En effet, retenons que, pour tenter de corriger cette situation, des textes légaux et réglementaires furent promulgués en vue d’organiser le marché des assurances. C’est ainsi que, par la suite, l’ordonnance du 23 Novembre 1966, celle portant création de la Société Nationale d’Assurances, a été abrogée et remplacée par celle du 2 juin 1967 portant octroi du monopole des assurances à la SONAS ; dont nous parlerons dans la section suivante. Actuellement la SONAS est régie par l’ordonnance-loi n°194 du 5 mai 1978 en tant qu’entreprise publique à caractère technique et commercial.
Il est important de noter que la création de la SONAS est intervenue pour, d’une part une raison politique qui s’exprime par la jouissance totale de la souveraineté nationale dans le secteur d’assurance en particulier et économique en générale, d’autre part, une raison purement économique, pour mettre fin à l’hémorragie financière ; en dotant le pays d’une institution pouvant servir d’instrument de collecte d’épargne et de moteur de développement.
Ainsi donc, l’épargne issue de cette société devrait aider et servir tant soit peu aux financements des investissements nécessaires pour l’économie nationale.
Ayant vue le jour six ans après l’indépendance de notre pays, la SONAS a permis aux autorités publiques de prendre certaines mesures à sa création, ayant généralement pour objectifs de : - Renforcer la souveraineté nationale sur le plan socioéconomique ; - Etendre à l’échelle de la population le besoin de protection au moyen des assurances ; - Créer à court, moyen et long terme un générateur des revenus pour l’Etat ; - Augmenter la capacité contributive du secteur des assurances au développement du pays.2
§1 : Caractéristique Juridique et la législation de la SONAS
La SONAS est un établissement public, en vertu de l’ordonnance-loi n°74/015 du 10 juillet 1974 qui, modifia et compléta celle du 14 septembre 1972. Elle est une entreprise publique à caractère technique et commercial, selon l’article 1er de l’ordonnance-loi n°194 du 05 mai 1978, dotée d’une personnalité juridique. En tant que telle, la SONAS constitue un organisme public soumis à une tutelle de deux ministères à savoir : - Le ministère des finances comme tutelle financière et ; - Le ministère des portefeuilles comme tutelle technique chargée du contrôle administratif.
En exploitant un service public, la SONAS exerce une activité créée par les pouvoirs publics en vue de satisfaire un besoin d’intérêt général.
B. La législation de la SONAS
L’Etat congolais (Zaïrois à l’époque), ne devrait pas se limiter juste à la création de la SONAS ni encore moins se contenter de son existence, d’autant plus qu’il voulait faire d’elle un outil économique de valeur.
C’est pourquoi, il devrait mettre sur pied une réglementation adéquate susceptible de lui permettre de mieux contrôler tout le secteur des assurances. Ainsi, plusieurs textes sont intervenus en matière d’assurance ; nous citerons entre autres : - L’ordonnance loi n°66/622 du 23 novembre 1966 portant création de la SONAS ; - L’Ordonnance-loi n°70/008 du 12 février 1970 portant statut de la SONAS qui a été modifié par celle n°72/049 du 14 septembre 1972, modifié et complétée elle aussi par la loi n°74/015 du 10 juillet 1974 ; - La loi n°73/013 du 05 janvier 1973 relative à l’obligation des assurances de responsabilité en matière d’utilisation des véhicules automobiles (R.C automobile) ; - La loi n°74/008 du 10 juillet 1974 particulière portant assurance obligatoire des risques d’incendie de certains bâtiments ; etc.…
La SONAS est qualifié par la loi comme établissement public à caractère commercial. Etant sous la dépendance de l’administration publique, elle poursuit un but lucratif, qui s’exprime essentiellement par l’exercice habituel d’actes de commerce.
Par ailleurs, le professeur clément KABANGE NTABALA fait remarquer que malgré cette qualité, la SONAS peut poser certains actes considérés comme commerciaux au sens de la loi mais sous le contrôle du pouvoir public, il s’ensuit par conséquent qu’elle peut avoir qualité de commerçant mais pas dans une acception prise au sens du droit privé.2